8. La Joute

Les mêlées de la Joute ne sont pas « juste » des affrontements entre deux sorciers dont chacun essaie de mettre l’autre hors de combat : ce sont des ballets savamment orchestrés, des tableaux vivants, ondoyants et haletants, se déroulant comme une pièce de théâtre all’improviso dans laquelle la victoire n’importe pas tant que la beauté du geste. C’est ainsi que tout duel est évalué par un consistoire de trois arbitres qui attribue à chaque jouteur une note sur huit, basée sur quatre critères :

- le résultat obtenu vaut pour un point (victoire, défaite, match nul).
- l’esthétique du style de combat vaut pour trois points (le duelliste se bat-il avec la grâce d’une vélane dansant à la lumière de la lune, ou bien avec tout le raffinement d’un troll enrhumé ?)
- le sens de l’honneur vaut pour deux points (le compétiteur a-t-il fait preuve de fair-play, ou a-t-il au contraire bassement profité d’une faiblesse de son adversaire ?).
- la complexité des sorts employés (un maléfice de Transphénotypation, c’est quand même autre chose qu’un sortilège Pousse-Doigts-de-Pieds) vaut pour deux points.

Vu l’importance donnée au style et à l’honneur, on comprend bien que les duellistes soient des artistes autant que des guerriers ; de fait, parce que le public attend d’eux, non seulement des prouesses martiales, mais aussi morales et stylistiques, la plupart sont des individus plus cultivés et coquets qu’on ne s’y attendrait. Il faut dire que dans un sport où, si un compétiteur est mis à terre par un sortilège qu’il n’a pas su arrêter, il peut quand même gagner des points s’il tombe avec grâce (un talent dont la légendaire duelliste Icarise Cadut s’était fait une spécialité), le sens des priorités ne peut qu’être revisité !

La Joute se déroule depuis cent-cinquante ans dans la Grande Lice de Saint-Ange, un immense gymnase qui accueille plusieurs arènes servant de lieu de rencontre aux compétiteurs et aux centaines de spectateurs venus assister à leurs combats. La saison des duels court chaque année d’octobre à juin, avec un championnat individuel (le plus prestigieux, dont le vainqueur se voit remettre la Baguette de Diamant) et un championnat par équipes (duo, trio et quintuor). En plus de cela, une compétition de duels par équipe fut créée au niveau européen en 1836 sous le nom de Haut Tournoi International de Duel Magique – z’êtes priés de l’appeler « le Haut Tournoi » par facilité, comme tout le monde.